Rapport technique sur les modifications apportées au Recensement de 2021
Sexe à la naissance et genre : rapport technique sur les modifications apportées au Recensement de 2021

Date de diffusion : le 20 juillet 2020

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1. Introduction

Le recensement est le narrateur du pays. Quelle que soit la période traversée par le pays, bonne ou moins bonne, le recensement brosse un tableau détaillé de la mosaïque changeante du Canada — en fournissant aux Canadiens des faits sur nos origines, sur notre situation actuelle et sur les décisions pour guider notre avenir. Afin de répondre aux besoins du pays et rédiger le prochain chapitre de la principale source de données des Canadiens, Statistique Canada a mené des consultations et des discussions à l’échelle du pays. Nous avons également effectué un test du recensement auprès de plus de 135 000 ménages afin de déterminer si les répondants pouvaient facilement comprendre les questions nouvelles ou révisées et y répondre correctement. Nous avons écouté les Canadiens, car nous savons qu’il s’agit de votre recensement, de votre collectivité, de votre avenir.

Cette série de rapports techniques offre une vue détaillée des changements apportés au contenu du Recensement de la population de 2021, étant donné que le processus du recensement évolue constamment pour refléter les changements de la population canadienne et ses caractéristiques démographiques. Pour que le contenu du recensement demeure pertinent, il doit être adapté au climat social et économique actuel de sorte que les données du recensement comblent les besoins en matière d’information des décideurs.

Au cours des dernières années, la reconnaissance et la sensibilité du public à l’égard des communautés LGBTQ2 se sont accrues considérablement. À l’heure actuelle, peu de données fiables existent au Canada sur les populations transgenres et non binaires. Avant le début de la collecte du Recensement de 2016, Statistique Canada a commencé à recevoir des commentaires de Canadiens et Canadiennes précisant qu’ils ne seraient pas en mesure de répondre à la question sur le sexe, qui ne comprenait que deux catégories de réponse (femme ou homme), parce qu’aucune de ces catégories ne correspondait à leur réalité.

Pendant la collecte du Recensement de 2016, Statistique Canada a demandé aux Canadiens qui n’étaient pas en mesure de répondre à la question sur le sexe de ne pas fournir de réponse et d’ajouter plutôt un commentaire à la fin du questionnaire expliquant pourquoi ils n’avaient pas répondu à la question. À la suite du Recensement de 2016, Statistique Canada a étudié ces commentaires et a mené de nombreuses consultations auprès d’experts, d’universitaires et de communautés LGBTQ2 pour comprendre les besoins et les défis associés à la production de données fiables sur les populations transgenres et non binaires au Canada, puis a formulé des recommandations sur les modifications à apporter au Recensement de 2021.

La modification du contenu du recensement est un processus complexe comportant de nombreuses étapes, dont la tenue de consultations et la réalisation de tests. Le présent document fournit des renseignements relatifs aux mesures prises par Statistique Canada pour formuler des recommandations sur les modifications à apporter à la question sur le sexe et l’ajout d’une question sur le genre au Recensement de 2021.

2. Contexte canadien

Au cours des dernières années, au Canada, le cadre législatif a changé en ce qui concerne le genre. En juin 2017, le projet de loi C-16 a été officiellement adopté. Celui-ci modifiait la Loi canadienne sur les droits de la personne pour ajouter l’identité de genre et l’expression de genre à la liste de motifs de distinction illicite. Il modifiait également le Code criminel pour ajouter l’identité de genre et l’expression de genre à la définition des groupes identifiables à l’article 318 du Code. Aux articles 318 et 319, on s’appuie sur ces groupes identifiables pour définir les génocides et les crimes haineux.

En 2017, le gouvernement du Canada a créé le Secrétariat LGBTQ2 afin de renforcer la diversité et l’inclusion, de faire la promotion de l’égalité de la communauté LGBTQ2, de protéger les droits des membres de cette communauté et de lutter contre la discrimination. Le gouvernement a également renforcé le message selon lequel tous les Canadiens et toutes les Canadiennes ont le droit de participer pleinement à la société canadienne.

Plus récemment, en septembre 2018, le Secrétariat du Conseil du Trésor, en collaboration avec le ministère de la Justice et Statistique Canada, a produit un rapport intitulé Moderniser les pratiques du gouvernement du Canada en matière d’information relative au sexe et au genre, dans lequel on formule des recommandations en ce qui concerne la collecte et l’utilisation de données sur le sexe et le genre. Le document précise également que la collecte de renseignements sur le genre, qui devrait comprendre une option de genre inclusive en plus des options de genre féminin et masculin, devrait être réalisée par défaut par toutes les organisations fédérales, tandis que la collecte de renseignements sur le sexe (sexe biologique) ne devrait être réalisée qu’exceptionnellement, en fonction de raisons ou de besoins particuliers, comme dans le cas de programmes et de statistiques en santé et en démographie.

Enfin, on pouvait lire ceci dans le budget de 2018 : « Afin d’obtenir des données plus inclusives sur les sexes et les genres, les fonctionnaires de Statistique Canada collaborent avec les organisations LGBTQ2 en vue d’ajuster les questions et les choix de réponses du Recensement de la population pour mieux tenir compte de la façon dont les gens s’identifient, par exemple, en permettant aux répondants de répondre de manière non binaire. Ce choix fournira des renseignements essentiels pour comprendre les besoins des Canadiens LGBTQ2 et y répondre. »

Le budget de 2018 a également accordé des fonds à Statistique Canada pour créer un nouvel organisme, le Centre des statistiques sur le genre, la diversité et l’inclusion, chargé de mettre en œuvre un carrefour de données pour l’analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) pour appuyer l’élaboration de politiques et de processus décisionnels fondés sur des données probantes tant au sein du gouvernement fédéral qu’à l’extérieur.

Au cours des dernières années, les provinces et les territoires du Canada ont aussi apporté des modifications pour permettre aux citoyens et citoyennes de changer la mention du sexe sur certains documents officiels, comme l’acte de naissance.

3. Contexte international

En tenant compte du contexte national, Statistique Canada déploie tous les efforts possibles pour respecter les recommandations de la Commission économique pour l’Europe des Nations Unies (CEE-ONU) en ce qui concerne les recensements. Il agit comme intervenant clé au sein des groupes de travail qui examinent régulièrement ces recommandations.

À l’heure actuelle, il n’existe aucune norme internationale officielle en ce qui concerne l’identité ou l’expression de genre. Cependant, certains organismes nationaux de statistique ont commencé à élaborer des outils et des méthodes de collecte pour mesurer le genre.

En 2019, à la demande de la Conférence des statisticiens européens de la CEE-ONU, Statistique Canada, avec l’appui de l’Office for National Statistics du Royaume-Uni, a mené un Examen approfondi de la mesure de l’identité de genre dans lequel les questions et les défis concernant la mesure de l’identité de genre sont résumés. Statistique Canada continue de collaborer étroitement avec ses partenaires internationaux afin de créer des normes internationales sur le sexe et le genre, en plus de formuler des recommandations en ce qui concerne la manière de mesurer ces variables dans les recensements, les enquêtes et les dossiers administratifs.

4. Lacunes statistiques actuelles

À l’heure actuelle, il existe très peu de renseignements statistiques sur la communauté transgenre, y compris la population non binaire, au Canada. La plupart de ces statistiques sont tirées d’études universitaires réalisées dans des domaines particuliers (comme la santé) et elles ne peuvent être facilement désagrégées selon des caractéristiques sociodémographiques ou des régions géographiques.

Le manque de données sur les minorités de genre est perçu par de nombreux spécialistes — comme ceux du Williams Institute aux États-Unis et des universitaires au Canada — comme une limite qui nuit à la compréhension des expériences de cette population par les gouvernements, les organisations non gouvernementales et les chercheurs. Sans données sur cette population, il est difficile pour les gouvernements, les prestataires de service et d’autres institutions de créer des programmes et des politiques qui tiennent compte des préoccupations et des besoins de cette communautéNote 1.

Il faut disposer de renseignements statistiques sur la communauté transgenre pour mettre au point des lois, des politiques et des programmes inclusifs, que ce soit à l’échelon fédéral, provincial, territorial ou municipal, dans de nombreux domaines (p. ex. la justice et la criminalité, la discrimination sociale, la violence, le logement, l’isolement social, l’accès aux services, l’activité sur le marché du travail, l’immigration et le bien-être). Des ministères et des secrétariats fédéraux — comme le Secrétariat LGBTQ2, le Secrétariat du Conseil du Trésor, Emploi et Développement social Canada, Services aux Autochtones Canada, Santé Canada, l’Agence de la santé publique du Canada, la Commission canadienne des droits de la personne, la Commission de la fonction publique, le ministère de la Justice, Sécurité publique Canada et le ministère des Femmes et de l’Égalité des genres — sont susceptibles de faire grand usage des données sur la communauté transgenre lorsqu’elles seront accessibles.

Puisque la communauté transgenre est très petite, le recensement est le seul outil statistique qui permet de dénombrer de manière fiable la population à l’échelle locale (comme les municipalités). Un tel dénombrement est important parce que les municipalités sont chargées de fournir un certain nombre de services directement à la population.

5. Élaboration de questions sur le sexe à la naissance et le genre

À la suite du Recensement de 2016 et des modifications législatives subséquentes, Statistique Canada a évalué des façons de mesurer la population transgenre, y compris la population non binaire, au Canada au moyen de ses différents programmes statistiques, dont le recensement.

L’une des premières étapes du processus a consisté à faire appel à des spécialistes du domaine de l’identité de genre. Dès 2016, des consultations et des groupes de discussion ont eu lieu auprès des membres de la communauté transgenre, y compris des personnes non binaires, pour permettre de mieux comprendre les concepts et les enjeux associés à la mesure de cette population au moyen de programmes statistiques. Ces activités ont également été menées pour élaborer des questions précises pour les enquêtes sociales de Statistique Canada.

Entre l’hiver 2017 et l’été 2018, des tests qualitatifs ont été réalisés auprès de membres des communautés transgenre (personnes dont le genre est différent de leur sexe à la naissance) et cisgenre (personnes dont le genre correspond à leur sexe à la naissance) pour valider la compréhension des questions sur le sexe à la naissance et le genre.

En avril 2018, Statistique Canada a publié de nouvelles normes sur le sexe à la naissance et le genre afin de préciser les classifications et les concepts utilisés dans ses programmes statistiques.

Après la publication de ces normes, on a demandé aux programmes de statistiques sociales de Statistique Canada d’intégrer graduellement une question normalisée sur le genre par défaut, parfois en combinaison avec une question sur le sexe à la naissance s’il est nécessaire de mesurer la population transgenre ou d’utiliser les données pour produire des indicateurs démographiques ou sur la santé.

En 2019, Statistique Canada a réalisé un test du recensement national qui comprenait des questions sur le sexe à la naissance et le genre.

6. Test du recensement de 2019

6.1 Méthodologie

En vue du Recensement de 2021, Statistique Canada a réalisé le Test du recensement de 2019 de mai à juin 2019. Ce test évaluait les modifications apportées au libellé et à l’enchaînement de certaines questions, ainsi que l’ajout éventuel de nouvelles questions. Il évaluait également du nouveau matériel de communication sur le recensement et différentes méthodes de collecte.

Pour veiller à ce que le recensement mesure d’importantes tendances au sein de la société, de nombreuses modifications au contenu du Recensement de 2021 ont été proposées. Pour évaluer de manière quantitative les répercussions des modifications, différentes versions du questionnaire du recensement ont été mises à l’essai en 2019. La version de contrôle était le questionnaire du Recensement de 2016 auquel on avait ajouté une question sur la religion (posée tous les 10 ans). Il s’agissait de la version de référence du questionnaire du recensement. C’est la forme que le questionnaire du Recensement de 2021 prendrait si aucune modification n’était apportée par rapport au cycle précédent. D’autres versions du questionnaire ont été établies pour mettre à l’essai un nouveau contenu et un contenu modifié. Les différentes versions ont été comparées pour évaluer les questions, le libellé, les sauts, les messages de vérification et d’autres caractéristiques à ajouter au Recensement de 2021.

Le questionnaire abrégé (formulaire 2A) et le questionnaire détaillé (formulaire 2A-L) de même que le questionnaire en ligne, ou questionnaire électronique (QE), et le questionnaire papier (QP) ont été mis à l’essai. Ce processus a été suivi parce que le QE et le QP ont des enchaînements et des sauts différents. De plus, le profil démographique des répondants qui utilisent le QE et le QP est différent.

En tout, la composante de test du contenu du Test du recensement de 2019 se fondait sur un échantillon de près de 135 000 ménages. Il a fallu créer différents questionnaires d’essai et de contrôle, en français et en anglais, qui ont été distribués auprès de neuf groupes d’analyse. Pour que les objectifs du test soient atteints de manière adéquate, les répondants devaient obligatoirement répondre au questionnaire du Test du recensement de 2019.

De plus amples renseignements se trouvent dans le document « Test du contenu du recensement de 2019 : Conception et méthodologie ».

6.2 Questions sur le sexe à la naissance et le genre mises à l’essai

Les questions suivantes ont été mises à l’essai lors du Test du recensement de 2019 :

Q3. Quel était le sexe à la naissance de cette personne?
Par sexe, on entend le sexe assigné à la naissance.

Cette question porte sur le sexe à la naissance, qui est déterminé par les caractéristiques biologiques de la personne. Il est probable que cette question se rapproche du concept auquel les personnes renvoyaient lorsqu’elles répondaient à la question sur le sexe lors des recensements précédents. Il est donc important de poser cette question non seulement pour mesurer la population transgenre (lorsqu’elle est posée en même temps que la question sur le genre), mais également pour assurer la comparabilité historique.

Il faut noter qu’une très petite proportion de la population pourrait être née avec des caractéristiques biologiques du sexe féminin et du sexe masculin. Le terme « intersexe » désigne souvent ces personnes. Les normes diffusées par Statistique Canada en 2018 renferment une disposition pour cette catégorie de réponse à la question sur le sexe à la naissance. Cependant, lors du Test du recensement de 2019, cette catégorie de réponse n’a pas été ajoutée au questionnaire parce que seul un très petit groupe de la population affiche ces caractéristiques biologiques, et de nombreuses personnes intersexes ne savent pas qu’elles le sont et ne découvrent souvent cet état de fait que plus tard au cours de leur vie.

Q4. Quel est le genre de cette personne?
Par genre, on entend le genre actuel, qui peut différer du sexe assigné à la naissance ou de celui inscrit dans les documents légaux.

Cette question porte sur le genre du répondant. Il s’agit d’un concept multidimensionnel qui comprend des aspects psychologiques, sociaux et comportementaux. Le genre renvoie à la manière dont une personne se décrit au moment de la collecte. Il peut changer au fil du temps. Le genre d’une personne peut être différent de ce qui figure sur les documents juridiques.

Cette approche, qui comprend deux questions, permet à Statistique Canada :

Les nouvelles questions visent à fournir des renseignements fiables, cohérents et de grande qualité au sujet de la population transgenre et non binaire au Canada.

6.3 Résultats du Test du recensement de 2019

Note méthodologique :

Aux fins d’analyse, la suite du présent document est séparée en deux parties : la première présente une analyse des réponses obtenues au moyen du questionnaire électronique, et la deuxième présente une analyse des réponses obtenues au moyen du questionnaire papier. L’analyse de la version papier est très peu représentative de la population canadienne en raison du biais important découlant de la tendance accrue de la population plus âgée à remplir le questionnaire papier par rapport à la population plus jeune.

Les chiffres diffusés dans la section qui suit peuvent être utilisés seulement dans l’objectif de vérifier si les questions proposées sont bien comprises par la population, si elles enregistrent des taux de réponse satisfaisants et si elles peuvent fournir des estimations de qualité acceptable dans le cadre d’un recensement.

Pour cette raison, il est important de noter que les chiffres analysés ci-dessous ne peuvent en aucun cas être utilisés comme une estimation des populations transgenres et non binaires vivant au Canada.

6.3.1 Questionnaire électronique

La question posée à propos du genre a bien fonctionné dans le questionnaire électronique, notamment parce que le taux combiné de non-réponse et de réponses non valides était très faible, soit de l’ordre de 0,10 %.

De plus, la répartition selon le genre est assez près de celle obtenue selon le sexe à la naissance (si on exclut les réponses invalides ainsi que les non-réponses), comme le montrent les tableaux suivants :

Tableau 1 
Sexe à la naissance, Test du recensement de 2019
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Sexe à la naissance. Les données sont présentées selon Sexe à la naissance (titres de rangée) et Pourcentage(figurant comme en-tête de colonne).
Sexe à la naissance Pourcentage
Féminin 50,7
Masculin 49,3
Total 100,0
Tableau 2 
Genre, Test du recensement de 2019
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Genre. Les données sont présentées selon Genre (titres de rangée) et Pourcentage(figurant comme en-tête de colonne).
Genre Pourcentage
Féminin 50,64
Masculin 49,29
Non binaire 0,07
Total 100,00

La proportion de personnes de genre non binaire de tout âge est de 0,07 %. La proportion de personnes de genre non binaire est trois fois plus élevée chez les personnes de moins de 35 ans (0,11 %) que chez celles de 35 ans ou plus (0,02 %).

Selon les résultats du Test du recensement de 2019, l’estimation (en pourcentage) de la population transgenre, y compris les personnes non binaires, est de 0,35 %, ce qui semble réaliste à la lumière de résultats provenant d’autres sources, tant nationales qu’internationales.

En premier lieu, il est possible de comparer ces résultats à ceux de l’Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés (ESEPP) qui a été réalisée en 2018 par Statistique Canada et qui comportait également les questions sur le sexe à la naissance et le genre. Selon cette enquête, 0,24 % de la population canadienne était comprise d’hommes ou de femmes transgenres ou de personnes non binaires. Si l’on applique l’intervalle de confiance de 95 %, cette population se situe de 0,16 % à 0,36 %. Les résultats du Test du recensement de 2019 se trouvent dans cette fourchette également.

Deuxièmement, les résultats du Test du recensement de 2019 correspondent de près à ce qui a été observé dans certaines études aux États-Unis, comme dans l’étude How many LGBT people are there in the U.S.? publiée par le Williams Institute en 2011 (0,35 %), et dans l’étude Transgender Population Size in the United States: a Meta-Regression of Population-Based Probability Samples, publiée dans l’American Journal of Public Health en février 2017 (0,39 %; intervalle de confiance de 95 % : de 0,16 % à 0,62 %).

D’autres études ont montré une proportion légèrement plus importante, de l’ordre de 0,58 %, comme celle du Williams Institute de 2016 intitulée How Many Adults Identify as Transgender in the United States?

Les résultats du Test du recensement de 2019 montrent également que la proportion d’hommes transgenres (0,15 %) est légèrement plus élevée que celle de femmes transgenres (0,13 %). Le ratio est très près de l’estimation (non publiée) de l’ESEPP. Bien que, dans le passé, la tendance semblait plus marquée vers les femmes transgenres — les groupes LGBTQ2 affirmant cependant que le ratio était plus près de 50/50 —, il a été observé dans la littérature spécialisée que cette tendance semble maintenant être renversée, en particulier chez les jeunes. Cette tendance semble confirmer les résultats du Test du recensement de 2019, étant donné que, chez les personnes de moins de 35 ans, on observe 33 % plus d’hommes transgenres que de femmes transgenres (0,20 % par rapport à 0,15 %) alors que, chez les personnes de plus de 35 ans, le ratio est presque de 50/50 (0,12 % par rapport à 0,11 %).

Genre selon la langue du questionnaire

Des différences sont également observées lorsqu’on analyse les résultats selon la langue du questionnaire.

La proportion de personnes non binaires découlant des questionnaires français est moins grande que celle produite à partir des questionnaires anglais. À l’heure actuelle, il est difficile de déterminer les raisons de cette différence, qui pourrait être le reflet d’une réalité différente au sein des populations francophones et anglophones. Le mot « genre » peut également recouvrer plusieurs sens dans la langue française, et il est possible qu’une certaine proportion de francophones de genre binaire ne comprennent pas bien le concept de genre. Cependant, les consultations et les tests qualitatifs ont démontré que le concept était bien compris par les personnes non binaires, ce qui tend à démontrer que ce faible nombre ne serait pas le résultat d’une incompréhension de la part des répondants.

6.3.2 Questionnaire papier

L’analyse des questionnaires papier doit être considérée avec prudence, car il existe un biais qui résulte de l’âge des répondants, une forte corrélation existant entre la propension à utiliser les questionnaires papier et l’âge des répondants : plus les répondants sont âgés, plus ils ont tendance à utiliser les questionnaires papier.

La non-réponse à la question sur le sexe dans le questionnaire papier avoisinait le 1 %, alors que celle pour le genre était beaucoup plus élevée, soit environ 8 %. En regardant les répondants pour lesquels il était possible de dériver un âge, on constate que cette non-réponse est surtout concentrée chez les personnes âgées de plus de 70 ans. Bien que la non-réponse à la question sur le genre soit assez élevée pour les personnes plus âgées, cette situation ne devrait pas avoir d’effet important sur la qualité des résultats, puisque la non-réponse au sexe est relativement peu élevée, ce qui permettrait d’utiliser le sexe à la naissance comme variable auxiliaire pour imputer le genre dans les situations de non-réponse.

La proportion de personnes de genre non binaire, si on ne tient pas compte de la non-réponse, correspond en gros à la moitié de l’estimation pour les questionnaires électroniques. Comme l’échantillon est biaisé par la forte proportion de personnes âgées, ce résultat était attendu.

Finalement, la proportion de personnes transgenres découlant du questionnaire papier est plus élevée que l’estimation mesurée par la collecte au moyen du questionnaire électronique. Comme le questionnaire papier ne comporte pas d’écran de vérification qui s’affiche si la réponse à la question sur le genre est différente de la réponse à la question sur le sexe à la naissance, il est probable que cette proportion soit surestimée en raison de faux positifs.

De plus, comme la spécification de réponse écrite du questionnaire papier demande « veuillez spécifier votre genre », il est possible que les répondants aient eu tendance à donner leur propre genre lorsqu’ils répondaient pour d’autres membres du ménage. Les questionnaires de tous ces répondants seront étudiés plus attentivement pour mieux comprendre leur comportement. Une stratégie de traitement pour corriger ces possibles faux positifs sera développée ultérieurement, le cas échéant.

En conclusion, cette analyse montre que, en général, les nouvelles questions sur le genre et le sexe à la naissance fonctionnent bien dans le contexte d’un recensement qui vise l’ensemble de la population canadienne. Il faudra cependant porter une attention particulière à l’estimation de la population transgenre sur les questionnaires papier en raison de l’absence d’étapes de vérification des réponses au sexe à la naissance et au genre lorsque celles-ci sont différentes.

7. Analyse et diffusion des données du Recensement de 2021

Comme il est attendu que les estimations de la population transgenre et non binaire seront statistiquement relativement faibles, une stratégie particulière de diffusion devra être développée par Statistique Canada afin d’assurer la confidentialité des réponses fournies par la population canadienne.

Statistique Canada s’engage toutefois à diffuser ces estimations tant que celles-ci sont d’une qualité acceptable. La stratégie de diffusion ainsi que le cadre d’analyse de ces données seront développés au cours des mois précédant le Recensement de 2021.

Statistique Canada procède également, de façon progressive, à l’introduction du concept du genre au sein de ses programmes d’enquêtes sociales. Ce processus tient compte de l’importance de s’adapter à la nouvelle directive du Secrétariat du Conseil du Trésor tout en maintenant la comparabilité historique avec les données publiées par ces programmes auparavant. L’introduction du concept de genre dans le questionnaire du recensement facilitera la pondération des données de ces programmes lorsqu’elles sont recueillies au moyen d’échantillons.

Finalement, la présence de questions sur le sexe à la naissance et sur le genre permettra au Programme des estimations démographiques de Statistique Canada de produire des données selon ces deux variables, ce qui étendra la gamme possible des usages de ces estimations, selon les besoins des utilisateurs. Des analyses et des études de faisabilité devront cependant être réalisées pour vérifier s’il y aura lieu de produire deux séries d’estimations démographiques et pour déterminer la façon dont leur production pourra être mise en œuvre compte tenu des ressources disponibles.

Conclusion

Le présent document décrit le contexte, les besoins en matière de données, les résultats du Test du recensement de 2019 ainsi que les prochaines étapes associées à l’ajout d’une question sur le genre au Recensement de 2021. La question portant sur le sexe sera aussi modifiée pour être plus précise en demandant le sexe à la naissance. Cette approche en deux temps a été identifiée par Statistique Canada comme étant une façon efficace de mesurer les populations transgenres et non binaires vivant au Canada, qui sont probablement de très petite taille. La mesure de populations d’une telle petite taille est toujours un défi d’un point de vue statistique, et le recensement comporte plusieurs avantages à cet égard. D’autres discussions et réflexions sont à venir quant à la manière dont l’organisme diffusera ces données statistiques tout en préservant la confidentialité des réponses fournies par les Canadiens.

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